Dix ans avant Stonewall, la révolte des clients LGBT au Cooper’s Do-Nuts de Los Angeles
Beaucoup savent déjà qu’aux Etats-Unis, les événements de Stonewall ont donné naissance au mouvement de libération LGBT moderne. Mais on aurait tort de croire qu’il s’agit du premier acte de résistance face aux violences policières ciblant les gays, les lesbiennes ou les personnes trans.
Ce qui s’est passé cette nuit-là rappellera des choses à ceux qui ont déjà lu sur les violences policières à l’encontre de la communauté LGBT. Le Cooper’s Do-Nuts était un café de nuit à Los Angeles, dans une zone particulièrement pauvre qu’on surnommait Skid Row (traduction: « les bas-fonds »). Fréquentée par des gays, des travailleurs.euses du sexe, des drag-quiens et des personnes qu’on désignerait maintenant comme trans, c’était un point de rencontre pour la communauté LGBT de Los Angeles.
Bien sûr, à l’époque, il existait des lois pour empêcher les LGBT de se rassembler et de faire des choses ensemble, et la police prenant un malin plaisir à harceler les clients du café. Les descentes étaient relativement fréquentes et les policiers arrêtaient en général tous ceux qui se trouvaient sur place. L’une des justifications de ces arrestations était une loi qui obligeait une personne à présenter un genre qui correspondant à ses papiers d’identité — une disposition que des fanatiques continuent à défendre aujourd’hui.
C’était donc une nuit comme tant d’autres en mai 1959, quand des policiers ont fait irruption dans le café et ont demandé à voir les papiers des client.e.s. Leurs victimes ce soir-là était deux drag-quiens, deux travailleurs du sexe et un homme gay. Mais pour une raison ou une autre, les clients en ont eu assez ce soir-là.
John Rechy, un auteur ciblé par les policiers, a résisté à son arrestation et s’est plaint qu’il n’y avait pas assez de place dans la voiture de police pour emmener les cinq personnes arrêtées. Les autres clients ont commencé à protester également, et ont repoussé la police en leur lançant des tasses, de la nourriture, des déchets et tout ce qui leur passait sous la main.
La police s’est enfuie et pour un temps, la rue s’est remplie de personnes LGBT en colère. Mais les policiers sont revenus avec des renforts, ont fermé la rue et ont contraint la foule à se disperser. Ce fut la fin de la révolte. Contrairement à Stonewall, l’incident ne s’est pas poursuivi les nuits suivantes. Et le mouvement LGBT, encore faible, n’a pas pu organiser d’événement de commémoration les années suivantes.
Mais ce moment de résistance a fait des petits: citons une manifestation à un centre de recrutement de l’armée à New York en 1964, une révolte contre le harcèlement de la police à un dancing à San Francisco en 1965, une action contre un café homophobe à Philadelphie en 1965, les émeutes de la cafétéria Compton à San Francisco en 1966, et une décennie après Stonewall, les White Night Riots en 1979.
Le point commun de tous ces événements, c’est la réaction de la communauté face à la violence policière.